Une éleveuse nature

Margot Morisot
À 26 ans, Margot Morisot a renoncé à des études d’histoire pour vivre en Pays de Sault où elle a grandi. Depuis un an, elle élève des vaches, cultive des pommes de terre et produit sa propre bière. Elle a reçu en novembre, à Paris, le prix Solidarité attribué par Agrilocal à la coopérative du Pays de Sault.

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Comment une jeune femme de 26 ans décide-t-elle de s’installer seule à Rodome ?
J’ai grandi ici, au milieu des vaches. C’est le rapport à la nature qui m’a poussé à choisir cette voie. Ma mère est historienne et j’ai toujours été attirée par l’histoire médiévale et contemporaine. J’ai entamé des études à La Sorbonne mais je n’étais pas faite pour la vie parisienne. C'est lors de mon stage à la Chambre d’agriculture de l’Aude que j’ai réalisé qu’il était possible de m'installer moi aussi comme agricultrice.

Pourtant, le métier d’agriculteur est difficile. Comment peut-on vivre de ce métier aujourd’hui ?
Mon idée est d'essayer de ne pas dépendre des subventions de la PAC. Je m’inscris dans
une agriculture paysanne avec de petites exploitations, peu d’animaux, moins de terres et des productions diversifiées. Après-guerre, l'agriculture a été encouragée à produire plus pour redresser la France. Cette agriculture hyper productiviste et mécanisée n’est plus viable. Elle dépend trop des marchés mondiaux et des subventions.

Le plus difficile a été de trouver du foncier

Avez-vous dû surmonter certains obstacles lors de votre installation ?
Le plus difficile a été de trouver du foncier. J’ai eu aussi une première expérience très négative avec une banque. Au départ, ils me suivaient sur mon projet avant de refuser car j’étais une femme seule. Un banquier m’a même dit : « si vous aviez un homme pour faire les clôtures, le prêt aurait été accordé. » J’étais en colère mais cela m’a motivé pour réussir et finalement une autre banque a cru en moi et, en deux jours, j’ai obtenu mon prêt !

Comment s’organise votre agriculture paysanne ?
50 % de mes revenus sont issus de la vente directe de viande de veau. Je possède dix mères Black Angus, une race écossaise sans cornes, dont la viande est très persillée. Et le reste provient de la production de bière artisanale. Je cultive toutes les matières premières, l’orge et le houblon. Le but est de proposer un produit 100 % naturel avec un processus de fabrication se déroulant
entièrement à la ferme.

Vivre à Rodome, sur mon exploitation, c’est le bonheur.

Vous produisez aussi des pommes de terre ?
Oui. Nous sommes quatorze producteurs au sein de la coopérative du Pays de Sault. Nous avons reçu le prix Solidarité d’Agrilocal récompensant notre action, qui vise à développer le territoire. Depuis deux ans, nous avons ouvert un atelier pour les pommes de terre non commercialisables, que nous transformons en frites ou en lamelles pour la restauration collective. Nous avons pu
ainsi créer deux emplois.

Qu’est-ce qui vous rattache au Pays de Sault ?
J’aime tout simplement cet endroit où j’ai grandi. C’est une nature préservée. Certes, nous sommes loin de tout, mais aussi loin de la pollution, du stress de la ville... La météo rude en hiver n’est pas un problème car on s’organise et la solidarité opère.En revanche, les services
publics ont tendance à disparaître peu à peu. Malgré tout cela, vivre à Rodome, sur mon
exploitation, c’est le bonheur.